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Les plus belles propriétés en vente à nos frontières

Les plus belles propriétés en vente à nos frontières

La Nao : une maison d'architecte sur le côte nord de Barcelone

Hôtels particuliers, maisons d’architectes, villas paradisiaques… Ces merveilles attendent preneurs à deux pas du territoire français. Décryptage d’un marché en plein essor.

“À Bruxelles, une belle voiture ne se fait pas rayer sa carrosserie dans les rues, assure Jean de Kerchove, administrateur de l’Immobilière Le Lion. Les Belges aiment la réussite.” Et ils ne sont pas les seuls en Europe. Les Britanniques attirent les fortunes étrangères sur leur territoire en exemptant d’impôts les revenus perçus hors du pays. Tout comme des cantons suisses, qui accordent un “forfait fiscal” avantageux, négocié uniquement sur le train de vie. Il n’y a pas à dire, on rêve. Le réveil est à deux pas.

BRUXELLES : DE TRÈS BELLES PIERRES Place Brugmann, avenue Molière, Ixelles, Uccle… En France, ces noms de sites bruxellois commencent à faire le tour des cercles, où l’argent ne fait pas le bonheur mais y contribue. D’autant que l’immobilier de la capitale belge est réputé pour la qualité de son architecture. Art nouveau, Art déco, XVIIIe siècle, maisons d’architecte signées Marc Corbiau, une vedette du cru : la collection de styles impressionne. Les prix assez light aussi. “Il faut compter entre 2 et 2,5 millions d’euros pour un hôtel de maître et 3,5 millions pour une propriété rénovée avec jardin et garage”, relève Jean de Kerchove. À Paris, à qualité égale, ce serait dix fois plus cher, voire introuvable.

La hausse des prix semble “inexorable” pour la fédération royale belge du notariat. D’après sa plus récente enquête, les maisons ont pris 10 % à Bruxelles, et même 25% à Ixelles, la commune “arrondissement” la plus huppée. Ceci étant, les valeurs du luxe stagnent, d’après les cabinets spécialisés dans ce créneau. Les propriétaires sont tout de même à l’affût : “Ils ont bien envie d’augmenter leurs prix de vente. Mais je refuse, car il y a beaucoup de choix” admet Hélène Van de Velde, directrice d’Emile Garcin Bruxelles.

La recherche d’une villa au bord de la mer peut conduire jusqu’au “Zoute” (Knokkele- Zoute) sur la côte flamande, encore peu connue des Français. Le marché immobilier a tendance à “snober” Bruxelles : “Sur la digue, le meilleur emplacement, l’appartement est cédé à 10 000 euros/m2 et la villa à 20 000 euros/m2. Les records atteignent 30000 euros/m2”, annonce Thibault Vanden Berghe, de l’agence Het Zoute. Plus en retrait, une villa moderne “quatre façades”, rénovée, avec un beau jardin, ne livrera ses clés qu’en échange de 3 millions. Pas moins. C’est le Deauville aux villas anglo-normandes de la Belgique.

GENÈVE : VUE LAC OBLIGATOIRE Genève n’est pas bon marché. Les gammes moyennes tournent entre 11000 et 12000 euros/m2 et l’exceptionnel autour de 30 000 euros/m2. La flambée a été effrénée entre 1999 et 2012 : +120% (contre + 44 % en Suisse). Tant et si bien qu’une baisse sacrificielle s’amorce : “Il faut tabler sur -20 à -30% pour le classique et -10 à -15% sur l’exceptionnel”, d’après Frédéric Quennoz, directeur d’Emile Garcin Genève. Forfait fiscal contesté, secret bancaire malmené et franc suisse fort pénalisent la demande qui devient moins pressante. Parallèlement, l’offre s’accroît. La nouvelle fiscalité française étant dans l’oeil du cyclone, des propriétaires genevois ont anticipé un renouveau de l’exil des Français. En guise de tentations, ils ont mis sur le marché leurs plus belles propriétés qui vont jusqu’à 1000 m2 et 20 à 25 millions d’euros.

La clientèle française exprime-t-elle des exigences particulières ? “Elle apprécie le charme, les beaux matériaux et pas le surfait, réplique Céline Cerino, fondée de pouvoir de Barnes Suisse. Le critère majeur demeure la vue sur le lac, mais pas forcément le pied dans l’eau plutôt recherché par les Russes.” Les prix plus élevés qu’en France surprennent. À ce niveau, l’offre déçoit parfois, mais l’achat se conclut tout de même. “On vient vivre à Genève pour beaucoup d’autres raisons que le forfait fiscal. D’ailleurs, la Suisse n’est pas le pays le plus attractif fiscalement”, rappelle, comme beaucoup de Suisses, Lennig Pedron, responsable marketing et communication de l’agence Brolliet. On s’expatrie à Genève, il est vrai, pour les propriétés cossues autour du lac avec ponton et piscine, les déplacements en Europe d’un coup de jet souvent privé, la montagne où attend le chalet, les écoles de prestige… Il n’y a pas que l’argent dans la vie !

BARCELONE : LA BULLE DÉGONFLE Cela n’a pourtant rien à voir avec l’exubérance de la maison Battló de Gaudi à quelques pas. Mais c’est aussi une propriété féerique : un ancien palais du Paseo de Gracia, l’adresse qu’il faut avoir sur sa carte de visite à Barcelone. À 15 millions d’euros, le prix reste exceptionnel pour la capitale catalane, car les valeurs ont chuté prodigieusement, comme dans tout le pays, y compris sur le marché du luxe. “Depuis 2007, la baisse a atteint 40 à 45%”, confirme-ton chez Barcelona Sotheby’s International Realty. L’agence a aussi en vente des villas de grand luxe : l’une, à huit minutes du centre, avec vue sur la mer à 1 490 000 euros ; l’autre, face à la plage, près de Sitges, à 3,2 millions…

“C’est le meilleur moment pour acheter”, rassure Maître Yassir Benhammou, du cabinet d’avocats Bressers Law, implanté en Espagne. “Cependant, le marché pourrait encore baisser durant deux à trois ans. L’achat doit se réaliser dans une perspective de plus long terme.”

En Espagne, les régions gardent la mainmise sur l’immobilier. Les droits d’enregistrement varient de 3 à 8%. La taxe d’habitation est de trois à dix fois moins élevée qu’en France. Pour la plus-value, le délai de prescription n’est que de quatre ans. L’impôt sur la fortune, rétabli par l’ancien gouvernement socialiste, reste en suspens dans le pays, mais la décision a été prise de ne pas le percevoir en 2013. De quoi faire rêver encore celle qui fut la “douce” France.

CÔME, PORTOFINO : TOUT EST NÉGOCIABLE De l’Italie, on connaît les palais princiers et les propriétés de vignobles toscans. On sait parfois que George Clooney possède une résidence d’été au bord du lac de Côme. On ignore trop souvent - et c’est dommage - qu’il n’existe pas d’impôt sur la fortune lié à la résidence principale, ni de plus-value après cinq ans de détention d’une résidence secondaire. Seul s’acquitte un impôt foncier pas bien gros sur la valeur cadastrale. Et surtout, point à négliger en aucune façon : “En ce moment, tout est négociable, faute d’acheteurs italiens”, signale Lorenzo Mercolini, managing director de Milan Sotheby’s International Realty. Pour exemple, une villa au bord du dit lac de Côme, présentée à 5,5 millions, vient de partir à 3,5 millions. Ceci rebat les cartes d’un immobilier généralement coûteux à l’achat.

À Portofino, le Saint-Tropez de la Riviera italienne, la villa à 20 000 euros/m2 se négociera donc sans pudeur. Comme l’appartement à 10000 euros/m2 de Grimaldi, d’où l’on aperçoit Roquebrune. “Il faut voir là une alternative à la résidence secondaire en France tout en profitant de la Côte d’Azur et d’une plus-value avantageuse”, reprend l’agent immobilier en reconnaissant que peu de Français ont récemment sauté le pas vers l’Italie. Pour autant, poursuit-il, “la clientèle nord-américaine est de retour. C’est bon signe.”

© Emilio R. Ferrer