Propriétés Le Figaro

Dossier

Archi star, Miami

Archi star

Plus de 5 millions d'habitants dans une agglomération de 140 km de long. Bordée d'îles naturelles et artificielles

Depuis deux ans, les valeurs de Miami ne cessent de grimper. Bien que cyclique, comme l’immobilier nord-américain en général, ce marché d’exception ne semble guère disposé à changer de cap.

Elle a eu 100 ans cette année, et est encore jet-setteuse. Félicitations, Miami ! Jamais la plage, le soleil et l’embellissement des rues ne l’avaient rendue aussi glamour ! Certes, la crise des subprimes a entraîné des saisies hypothécaires en cascade. Mais, en bonne américaine, la perle du sud de la Floride a vite ressorti la tête de l’eau. Aujourd’hui, des architectes au sommet de la gloire rivalisent pour remporter les appels d’offres les plus futuristes de la ville. Ils sont tous là, ou presque : Frank Gehry a donné le la en concevant, en 2011, le New World Symphony, un des plus beaux centres de musique symphonique du monde. les suisses Herzog & Demeuron ont édifié le Pérez Art Museum, et Zaha Hadid porte aux nues le condo dans son projet de One Thousand Museum Tower. Tous n’ont qu’une idée en tête : donner un air de sculpture d’art contemporain à ce qui ne ressemblait autrefois qu’à un simple gratte-ciel. En peu de temps, l’ancienne cité latino s’est transformée en haut lieu de la sophistication et du luxe.

La folie Miami : près de 300 gratte-ciel, dont certains hauts de plus de 120 m et 170 chantiers en cours

Une cité iconique

New York est une grosse pomme et Miami une belle grappe de raisins, dont les grains sont de petites communes indépendantes, souvent insulaires, telle Miami Beach. Parmi les lieux les plus prisés : South Beach, la “carte postale” art déco, au sud de la ville de Miami Beach ; Bal Harbour, le village de luxe où vivent quelque 3 000 happy few ; très huppés aussi, Coconut Grove, lieu de prédilection des hippies autrefois, des artistes aujourd’hui, et Coral Gables, où règne une atmosphère hispanique colorée. souvent, les copropriétés sont des domaines privés gardiennés (gated communities). Le “condo” représente la règle, mais pas la “co-op”, comme c’est le cas à New York, où tout acquéreur postulant doit passer un grand oral devant le conseil des copropriétaires avant d’entrer dans les murs. les biens les plus recherchés sont évidemment les penthouses. Perchés au sommet des gratte-ciel, ils offrent la plus superbe des vues. Quant aux maisons sur l’eau avec pontons, elles affolent les fans de yachting. Denrée rarissime : le foncier viabilisé pour faire construire. “Mon plus beau produit en vente est un terrain sur l’eau de 6 000 m2 à 20 millions de dollars, commente Stéphane Zerdoun, négociateur de One Sotheby’s International Realty. La parcelle comporte une maison des années 1950, dont la rénovation exigerait de nombreux travaux. Je l’ai fait visiter à une famille qui envisagerait de la démolir pour construire à la place une grande maison contemporaine.”
Les immeubles neufs, vendus sur plans ou à peine sortis de terre, sont légion, comme l’Atelier, l’Oceana, le Ritz Carlton Résidences, le Murano… Les valeurs grimpent au ciel en version “penthouse”, jusqu’à 25 à 30 millions de dollars. Des propriétés sur l’eau cotent haut, comme celle du chanteur Billy Joel, cédée l’an dernier pour 14 millions. ou la fabuleuse villa Jasmine, qui a appartenu à Enrique Iglesias, et qui a été mise à prix 25 millions de dollars auprès de Coldwell Banker Previews International (le propriétaire l’avait payée 7 millions d’euros en 2004). La palme revient à la brisa, sur Coconut Grove, qui demande 65 millions de dollars en échange de 28 000 m2 de terrain “les pieds dans l’eau”, et d’une demeure des années 1920 entièrement rénovée. C’est le niveau de transaction le plus élevé du cru. Or, au même moment, un pied-à-terre de deux pièces placé sur Ocean Drive, la fameuse avenue de South Beach, vaut 700 000 dollars. Le marché oscille entre folie douce et réalisme. C’est tout Miami.

Le One Thousand Museum, conçu sur 62 étages par Zaha Hadid, l'un des fleurons du renouveau architectural de Miami. A partir de 4 millions de dollars, livré en 2016 (Barnes)

Le marché oscille entre folie douce et réalisme

Une résurrection downtown

Phénomène récent aux Etats-Unis, les centres-ville se métamorphosent en lieux d’habitation, alors qu’auparavant ils se vouaient plutôt au business. D’où l’émergence, ou plutôt la résurrection, des quartiers centraux de la métropole, comme Edgewater, Brickell et, dernièrement, Design District, heureux mélange de luxe et de mode qui pourrait prochainement ressembler au faubourg Saint-Honoré. La construction du Brickell City Center, un centre commercial grand comme seule l’amérique sait les faire, arrive à son terme. les appartements, aussi luxueux que sur Miami Beach, sont
commercialisés entre 550 000 et 2 700 000 euros. un tout petit peu plus anciennes, les trois tours de l’Icon Brickell, magnifiées par le design de Philippe Starck, donnent le choix dans une gamme d’habitations à partir de 500 000 dollars. “Les opportunités dans cinq ans ne seront plus aussi attractives. On ne trouvera plus rien à ce niveau de prix”, anticipe Stéphane Zerdoun. “La période des soldes est déjà finie, renchérit Elisabeth Gazay, directrice associée du bureau de Miami de Barnes. Les prix pourraient se stabiliser sur les produits classiques mais continuer à monter sur l’exceptionnel”, prévient-elle. Les biens tournent vite. 2013 et 2014 ont vu naître des records de transactions. en moyenne, une maison reste 51 jours sur le marché de Miami et se vend à 94 % du prix demandé. Un appartement n’attend pas plus de 66 jours son futur propriétaire. Par tradition,
l’acquéreur est plutôt sud-américain, attiré par la valeur refuge que constitue Miami. Les européens se montrent de plus en plus présents (Français, Italiens, Britanniques…). Arrivent un bon nombre de Canadiens et d’Américains de Boston et de New York, en quête d’un pied-à-terre ou d’une résidence secondaire, voire tertiaire. Le cofondateur de Kayak, le moteur de recherche du tourisme, vient ainsi d’acquérir pour 9 millions de dollars un condo de South of Fifth, sur la pointe sud de Miami. Loin d’émerger, ce quartier touristique s’achète au prix fort. Pour un américain du nord-est, il affiche cependant encore des prix raisonnables… Tout au moins, comparés à new York !

au 1080 Brockell. The Bond, dont les travaux ont comencé voici trois mois : de 306 000 dollars le studio de 50 m² à 1 250 000 dollars le 160 m² (Marc Foujols)

Des affaires en périphérie

Et si le potentiel, le vrai, le pur, le sûr, ne se trouvait ni sur Miami beach, ni “downtown”, mais plutôt à une heure de Miami ? C’est ce que sous-entend Marc foujols, fondateur de l’agence parisienne qui porte son nom et d’un bureau en Floride. “Je reste un grand amateur de Palm Beach et des îles, comme Jupiter Island”, confie-t-il. le sable fin comme de la poudre de riz, le soleil 365 jours par an, des propriétés au caractère solidement affirmé, mais des valeurs à couper encore le souffle. Pour exemple : sur Jupiter Island, une charmante maison en bois de 325 m2, dans le style des keys, bénéficiant de 9 pièces et d’une piscine intérieure agrémentée d’une cascade, pour 550 000 euros. ou encore cette prestigieuse propriété à 3 780 000 euros (8 700 euros/m2), située à Palm Beach, sur deux niveaux avec ascenseur, caméras de sécurité, piscine chauffée et localisée à un quart d’heure seulement de l’aéroport international.
Pour un placement, l’éloignement de Miami est souvent plutôt un avantage. “De nombreux Français souhaitent investir aux États-Unis, mais recherchent le mouton à cinq pattes, regrette Victor Pagès, fondateur de My Us Investment. Or, on ne vient pas à Miami, une métropole aussi onéreuse à l’achat, pour rechercher du rendement. On y va pour le soleil, la plage et l’ambiance festive.” selon lui, l’investissement le plus rentable s’avère l’achat d’une maison en périphérie, à louer aux classes moyennes américaines, dans des villes où la demande locative est forte et régulière, aux alentours d’Atlanta et d’Orlando, par exemple. un avis que partage Greg Orquera, gérant de la branche investissements du groupe Orquera. Son lieu de prédilection : Sarasota, un “Cannes” à l’américaine sur la côte ouest de la Floride, située à une petite centaine de kilomètres de tempa, la troisième ville la plus peuplée de Floride.

L'achat judicieux se juge sur le long terme

A Miami, l’achat judicieux ne peut se juger que sur le long terme. ou en réalisant une opération de démolition/construction sur un terrain bien placé, au bord de l’eau et bénéficiant d’une vue conséquente. C’est un “coup” immobilier, que tentent de nombreux investisseurs, une plus-value qui ne sera pas taxée si elle est réinvestie dans l’immobilier.
Mais est-ce encore un marché de luxe ? La question majeure porte sur le tournant auquel ne saurait échapper Miami. Cette ville balnéaire de légende deviendra-t-elle une réserve de millionnaires à la façon de Monaco ? Ou sera-t-elle plutôt la reine des arts le jour et de la fête la nuit ? L’avenir le dira. Quoi qu’il en soit, Miami a beaucoup de potentiel pour assouvir son appétit de croissance.