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Portrait

Guy Pendanx, artisan ferronnier, Le maître des forges

Guy Pendanx se dit “aventurier et poète”, mais il sait aussi garder les pieds sur terre.

Expert du XVIIIe siècle, l’artisan ferronnier Guy Pendanx honore des commandes publiques et privées. Son atelier a été reconnu “Entreprise du patrimoine vivant”, et il s’apprête à ouvrir le premier musée de la forge et de l’outil.

Vocation, passion, transmission. Ces trois mots résument admirablement le parcours de Guy Pendanx. Président, depuis ce début d’année 2009, des métiers de la forge au Koweït, celui-ci maîtrise avec virtuosité les techniques traditionnelles, défend la ferronnerie comme un artisanat de prestige et exerce sa profession comme un art. Seules des pièces uniques et signées – portails, balcons, rampes d’escalier, pergolas, lampes, chenets, consoles... – sortent de son atelier, Les Forges de France, fondé en 1985 à Orthez et qui a obtenu en 2007 le label “Entreprise du patrimoine vivant”. Une reconnaissance d’importance pour cet apôtre de l’excellence, qui s’active avec générosité pour “la sauvegarde de ce merveilleux métier” parce qu’une “immense passion l’anime”. Parmi ses projets, l’ouverture prochaine du premier musée vivant de la forge et de l’outil, qui verra le jour avec la complicité de la commune de Pouillon, où sont installées ses trois forges.

Une clientèle internationale Entre commandes de particuliers et réalisations publiques, les chantiers ne manquent pas aux Forges de France. La maison Chaumet, Paco Rabanne et Pascal Morabito, entre autres, ont fait appel à Guy Pendanx, qu’une clientèle internationale s’arrache et qui ne doit sa bonne réputation qu’au bouche à oreille. Ainsi, il a réalisé la rampe d’escalier de l’ancienne fauconnerie du château de Versailles, et celle de l’escalier d’honneur de l’hôtel Ritz à Paris, la restauration du portail monumental du château de Peyrehorade ou de celui de la maison de Racine, à La Ferté- Milon. À la demande du chef Michel Guérard, il a fabriqué pour le restaurant des Prés d’Eugénie deux vasques en laiton poli ; et pour le château du comte de Bilbao, il dessine et exécute un portail monumental… C’est à sa mère que Guy Pendanx doit sa vocation, et il s’en amuse : “enfant, j’étais assez garnement”. Elle ne le lâche donc pas d’une semelle et l’emmène un jour chez le forgeron, à deux pas de la maison familiale. Le petit Guy n’a que 7 ans, mais il est immédiatement fasciné par le feu et la matière en fusion. Il découvre alors que le fer, qui lui résiste lorsqu’il joue, peut se travailler en y mettant les formes. “Je veux faire ce métier”, décrète-t-il ce jour-là. Il fait son apprentissage dans un atelier des Landes, dont le patron lui accorde sa confiance et le pousse à tenter sa chance à Paris. Guy Pendanx sait travailler le cuivre, l’étain, le fer, et gérer une équipe de 24 personnes, mais les grands artisans de la capitale le snobent, exceptées les Forges du Roy à Aubervilliers, où il acquiert l’expérience artistique qui lui manquait.

La main guidée par l’esprit Mais “l’hostilité de la grande ville” le pousse, au bout d’un an et demi, à rentrer dans le Sud- Ouest, “région de savoir-vivre et de qualité de vie.” Guy Pendanx s’installe d’abord à Orthez, avant de se replier sur Pouillon, dans les Landes, où il travaille avec l’aide d’un apprenti. Il lui faut, avoue-t-il, “tout maîtriser”, et s’il accueille et forme régulièrement des stagiaires, il ne veut pas que “la fabrication s’en ressente”. Le métier de ferronnier appelle l’excellence et des finitions parfaites, comme la table d’un grand chef ou le travail d’un couturier. “Chaque détail compte, il faut rendre la pièce plus vraie que nature avec la bonne courbe, la bonne ligne, le mouvement juste. Il suffit de peu pour passer à côté de l’essentiel.” Guy Pendanx adore toutes les étapes de son travail, mais admet une petite préférence pour celle du dessin, car “faire naître une oeuvre” l’émeut profondément. C’est le travail de la main guidé par l’intelligence de l’esprit, “un art de donner le coup là où il faut” et d’arriver à façonner “la pensée qui vient au bout des doigts.”

Le Mozart de la forge Aujourd’hui, Guy Pendanx est plus que jamais animé par la volonté de transmettre son métier, ses secrets et ses contraintes car, insiste-t-il, “c’est très important de susciter de nouvelles vocations. Le niveau baisse en matière de savoir-faire. Je tire la sonnette d’alarme, car il faut le maintenir.” D’où son engagement actif pour “sauver ce qui peut l’être” auprès des Meilleurs Ouvriers de France (MOF), dont il oublie modestement de préciser qu’il a obtenu le titre en 1994 dans la catégorie Ferronnerie d’art puis, en 2007, dans celle des Métiers de la forge, métiers de l’industrie. “Ce n’est pas un aboutissement. Chaque jour, on découvre quelque chose. C’est ça le piment, la valeur ajoutée au travail”, commente ce spécialiste du XVIIIe siècle, pour qui les oeuvres classiques n’ont plus de secrets, et dont un musicien de renom n’a pas hésité à dire qu’il était à la forge ce que Mozart était à la musique. Le travail dont il est le plus fier ? Toujours le dernier en date. En ce moment, la porte qu’il façonne pour un client français. Il dit s’adapter à toutes les situations et avoue rêver de travailler avec Jean-Paul Gaultier, dont il admire la créativité. À bon entendeur…

Photo © François Mouries / Maison Sud-Ouest

Guy Pendanx - 639, chemin du Piquet, 40350 Pouillon. Tél. : 05 58 89 59 28. https://www.pendanxguy.fr

« Chaque détail compte, il faut rendre la pièce plus vraie que nature (...). Il suffit de peu pour passer à côté de l’essentiel. »